mardi 28 novembre 2017

presqu'île

temps brumeux mais beau
je ne me presse de rien
au milieu des champs qui ont tant ramassé d'embruns 

terre retournée que les goélands retournent encore

terre mer
mer terre

et entre les deux
dix-sept secondes de prière devant la croix autour de laquelle
l'air sent le sel et le fumier parti en poussière


le Seigneur Dieu m'a ouvert l'oreille à l'instruction et l'instruction m'a reveillé à la révolte
et pourtant je me suis quand même perdu de vue

complètement perdu même

machines
moteurs
duvet d'oiseau accroché à la rouille

l'année grasse 
c'est du cran en prévision de l'année maigre
le temps perdu n'existe pas
le mauvais temps oui

c'est le temps qui dure beaucoup trop longtemps

y a des jours où y a du vide dans le paysage
y a des jours où je ne sais même plus marcher
y a des jours où je suis comme qui dirait foutu
vieux jours de tout 

où tout a un affreux goût de noisette
où y a des messes de partout
des messes pour les défunts
et des emprunts qui d'abord économisent la peine
et des emprunts qui ensuite pourrissent la vie

jamais d'emprunts jamais

les bêtes sont tristes de ne pas pouvoir se mettre à l'abri 
elles me regardent partir en direction du sémaphore
je n'ai plus aucun programme pour aujourd'hui sauf celui du vent qui bouge tellement que j'ai l'impression que la presqu'île s'éloigne