vendredi 30 janvier 2015

ligne 19

je me souviens une fois en 2007
j'étais parti pour acheter le journal
et je m'en suis foutu pour 67 euros
ah ça 
ils sont forts pour nous faire acheter
et même aujourd'hui
tenez
regardez
deux poches pleines
et encore j'ai oublié les biscottes
il a l'air de me parler le papy
mais c'est pas si évident
j'opine sans acquiescer
comme le couillon de base
ultraprésence muette
ce soir la terre est glacée comme jamais
les vitres se remplissent
d'abord à vue d'oeil 
et puis à ras bord
des gerbes des filaments
des gouttes comme des pépites
tout se passe comme prévu
à l'intérieur du ventre 
dans la chaleur du bus
j'ai 44 ans et demi 
et je préfère rêver 
je sais Sarah 
je suis quelqu'un de décevant



copyright Karine Baudot


mardi 13 janvier 2015

moteurs & rhizomes

chants de noël & gyrophare
bagage suspect
polar à la gare
quelqu'un a poucave
tour de passe-passe
au bord du canal
où le chaos génère du biz
doudounes à 50 balles
trucs à la mode
trucs à carreaux
clopes
cocaïne
les lascars parlent de meufs
écoute moi frère 
cette gadji
faut pas trop la calculer
mais si tu la calcules pas assez
tu vas passer pour un gros pédé
moteurs dans les mots
moteurs & rhizomes
rien n'est plus proche du déclin
que l'apogée
il se fait tard
il va neiger

samedi 10 janvier 2015

Laurent

silence étrange
au début de l'hiver
chantier à l'abandon
il devrait neiger
mais il neige pas
il devrait bosser
mais il bosse pas
effet retard
il ne va pas la tuer non
il ne va pas non plus se foutre en l'air
il va rassembler ses affaires
son horoscope
son historique
et l'atmosphère sera soudain beaucoup moins blonde
et le contexte sera d'un coup beaucoup plus sain
célibataire 
sans enfant
sans adresse
bien sûr qu'il boit
et que c'est pas bien
et que c'est pas bon
le petit feu et l'injonction
le contrat qui sert à rien
le contrat qui sert à faire comme tout le monde
tôt ou tard
en temps réel
dans la rue
l'aube arrive vite
adieu
à de suite 

vendredi 9 janvier 2015

un semblant de littoral

...la France est championne du monde...mais il n'est pas là...son meilleur ami se marie...mais il n'est pas là...son frère fait construire...mais il n'est pas là...ça fait un bail maintenant...qu'il se sait seul...seul et non pas unique...sous les bras des arbres...sous les regards en coin...une femme primigeste...se fume un petit joint...en terrasse...le jaune monte...ceux qui ont le triomphe facile pérorent au téléphone...un zonard kaki...déchiré par les quintes...récupère...appuyé contre les palissades...un cycliste d'une cinquantaine d'années...teste l'adaptabilité morphologique de sa combinaison de triathlète...grosse bedaine en avant & sac banane...une main dans le dos...il déguste son tango panaché...se retournant de temps en temps sur les petites jeunettes...qui portent leurs corps par dessus leurs fringues...petits hauts sexy...shorts moulants...à la grande satisfaction des voyeurs opportunistes...deux costauds bien entamés donnent des leçons de politesse aux badauds...un pépé fouille les poubelles...poussettes de marché...poussettes pour bébés...à la une des journaux...bruits étranges & besoins sordides...des enfants remplis à ras bord...encore une fois...grillades & rosé...et le ciel qui fait écran...bordel...lui...il pensait qu'il y aurait peut-être un peu plus d'options entre l'adolescence et l'andropause...heureusement...il se voit déjà longer la clôture de l'usine...qui borde le ballast...les wagons-citernes sont vides et le passage de la desserte se fait au pas...au loin...un semblant de littoral merdoie...

mardi 6 janvier 2015

Julie

les parents les grands-parents
leurs peaux leurs dénis
leurs réflexes conditionnés 
qu'ils ne comprennent pas
le rythme central la mélodie
je peux comprendre
mais qu'ils dénigrent à ce point
la culture des pauvres
ça non 
je comprends pas
pour moi primitif
ça veut dire pur
pures les eaux tranquilles autour de l'île
pur le dernier indigène qui se suicide plutôt que de devenir le premier esclave  
pures les deux vieilles femmes qui racontent cette histoire
en secret aux enfants de la forêt
et puis se transforment en oiseaux
Paris Toulouse
papier ciseaux
petits épisodes & double exil
c'est rien
c'est la vie
un jour crachat
un jour chocolat
et entre les deux
une spectaculaire enfilade de journées
des journées qui n'accrochent pas du tout la lumière 
des journées comme des salles d'attente